Mise
en ordre |
Les
radiogalaxies.
Ces objets sont
des galaxies d'apparence ordinaire (des galaxies elliptiques
géantes ou des galaxies lenticulaires, à une exception connue près,
la radiosource 0313-192, dans Abell 428, qui est une spirale) lorsqu'on
les observe dans le domaine visible, mais qui émettent puissamment dans
le domaine radio. Leur émission peut être des
centaines de fois plus puissante que celles des galaxies dites normales,
et parfois davantage. C'est le cas, par exemple pour M 82 (Grande
Ourse), M 87 (Vierge), Centaurus A (NGC 5128),
ou encore Cygnus A, qui est un million de fois plus brillante dans le domaine
radio que la Voie lactée.
Les régions de cette
émission, très étendues, apparaissent au premier abord comme deux lobes
placés de part et d'autre de la composante optique des galaxies concernées.
Ces lobes correspondent en fait à l'extrémité de jets très étroits
de gaz expulsés à partir des régions centrales de ces objets, et longs
parfois de plusieurs milliers d'années-lumière.
On citera aussi le cas extrême de 3C 236, où la source radio s'étend
sur plus de 15 millions d'années-lumière .
Les galaxies de
Seyfert
Ces galaxies, contrairement
aux précédentes, sont souvent des spirales (et
lenticulaires) et doivent leur nom à Karl Seyfert, qui, le premier a attiré
l'attention sur elles en 1943. Ce sont des objets dont le noyau est très
brillant (y compris dans le visible), et qui représentent par rapport
aux radiogalaxies un cran au-dessus dans l'échelle de l'activité. Exemples
: M 106 (Chiens de Chasse), M 77 (Baleine),
NGC 1410 (Eridan). On ajoutera que l'on rencontre
encore des noyaux qui ont les mêmes caractéristiques dans une petit nombre
de galaxies naines. Le Petit nuage de Magellan est dans ce cas. On distingue
par ailleurs deux classes de galaxies de Seyfert, les galaxies de Seyfert
de type 1 et de Seyfert de type 2, les secondes ayant un rayonnement UV
et X plus faible que les premières.
Le
quasar 3C 273 et son jet.
(Source
: Chandra Photo Album).
Quasars*
Les quasars marquent
encore une montée en puissance supplémentaire par rapport aux noyaux
des galaxies de Seyfert et plus spécialement à celles du type 1, auxquels
ils ressemblent le plus), qu'ils surpassent couramment de deux ordres de
grandeur. Leur nom est du contraction de quasi-stellar (source),
ou source quasi-stellaire, qui faisait référence, lors de leur découverte,
au fait que leur émission semblait provenir d'un objet ponctuel, similaire
à ce que serait celle d'une étoile. On a découvert par la suite qu'ils
étaient excessivement éloignés et n'avaient rien avec des étoiles.
Le quasar le plus proche connu est 3C 273, dans la constellation
de la Vierge. Il se situe à un peu plus d'un milliard
d'années-lumière (z = 0,158). En général les quasars se situent bien
plus loin. Ils sont particulièrement abondants à des distances
qui correspondent aux redshifts compris
entre z = 2 et z = 2,5.
Au cours des dernières
années, il a été possible d'obtenir des images montrant que les quasars
correspondent à une région très brillante (et toujours d'apparence ponctuelle),
situé au coeur de galaxies. Ces galaxies hâtes peuvent appartenir aux
principaux types morphologiques connues. Mais on note aussi qu'elles sont
souvent déformées par des interactions avec des galaxies voisines.
Galaxies-hôtes
de quasars, vus par le télescope spatial Hubble.
(Crédit:
John Bahcall (IAS, Princeton), Michael Disney (University of Wales),
NASA)
Les astronomes distinguent
plusieurs sortes de quasars selon qu'ils sont ou non des sources d'émission
radio. Certaines caractéristiques spectrales peuvent également être
un trait discriminatoire. Ainsi reconnaît-on une catégorie particulière
de quasars dont le spectre est pratiquement dépourvu de raies d'émissions.
Il s'agit des lacertides ou blazars. Le terme de lacertides fait
référence à BL Lacertae, prototype de ces objets (dans la constellation
du Lézard); quant au mot blazar, on peut le faire
dériver de l'anglais to blaze = flamboyer, mais peut aussi se comprendre
comme une contraction de BL lacertae et de quasar...
Le
modèle unifié |
Rouages |
La grande difficulté,
quand les astronomes veulent expliquer l'origine de l'énergie produite
par les noyaux actifs des galaxies, est que cette énergie est énorme
et provient d'une très petite région. Les mécanismes ordinairement envisagés
(par exemple, la fusion thermonucléaire, qui est à l'origine de l'énergie
des étoiles) ne sont pas suffisamment efficaces pour rendre compte des
observations. Aussi, la seule piste susceptible de tenir ses promesses
est celle de la gravitation. La conversion
d'énergie gravitationnelle en rayonnement
électromagnétique peut être 40 à 50 fois plus efficace que
la conversion de masse en ce même rayonnement. C'est ce constat qui est
le point de départ du modèle unifié des galaxies à noyau actif.
Schéma global.
Ce modèle unifié suppose au centre
de chacune d'elle la présence d'une immense concentration de masse dans
un très petit volume. D'un point de vue astrophysique, cela revient Ã
poser l'existence d'un astre insolite. Plusieurs candidats existent : étoiles
à bosons, boules de neutrinos, etc. La plupart de ces objets ressortent
d'une physique aux contours encore hautement spéculatifs. Aussi, le candidat
le plus généralement favorisé aujourd'hui est-il un trou noir
supermassif. Un tel objet, lui aussi est sans doute assez spécial, mais
il a l'avantage de se comprendre dans la cadre d'une physique déjà éprouvée
: théorie de la gravitation d'Einstein (relativité générale).
Le
disque d'accrétion
Quel que soit l'objet compact située
au coeur des galaxies à noyau actif, son grand intérêt, c'est la capacité
qu'il a à accélérer à de très hautes vitesses les corps qui viennent
dans son voisinage, et qu'il engloutit définitivement, dans le cas d'un
trou noir supermassif. En pratique, la matière
ainsi avalée transite d'abord par un disque d'accrétionde
quelque chose comme une unité astronomique de
rayon seulement, et dans lequel cette matière spirale en prenant
à chaque boucle un peu plus de vitesse. Les étoiles
entraînées dans se maëlstrom finissent elles-mêmes déchiquetées,
et tout n'est plus très vite dans ce territoire de violence qu'un plasma
porté à plusieurs milliards de degrés par la friction. Un tel milieu
évacue une énergie gigantesque sous forme de rayonnement, et c'est cette
énergie qui va rendre si brillant le quasar (ou l'objet apparenté) que
l'on observera.
La
géométrie de l'ensemble
En fait, et c'est ce qui fait toute la
puissance du modèle unifié, cette énergie ne s'extrait pas toujours
directement de sa zone de production en direction de l'espace intergalactique.
Il faut tenir compte de la géométrie de la galaxie-hôte, et plus spécialement
de la distribution de la matière environnante : on attend
anneau de poussières qui bloque l'énergie émise dans sa direction. De
plus le disque en rotation rapide fonctionne à la manière d'une dynamo,
et engendre un champ magnétique dont une composante dipolaire, favorisée
par la présence de l'anneau qui encercle le noyau, va être à l'origine
de l'accélération à de très hautes vitesses de diverses particules
chargées (électrons, protons) qui seront ainsi soufflés le long de jets
s'élançant de part et d'autre du disque, très loin dans l'espace.
Le
tableau résultant
Tous ces éléments réunis produisent
un tableau dans lequel les quasars occupent une extrémité, et les radiogalaxies
l'autre extrémité. Les quasars peuvent se comprendre comme des noyaux
actifs vues directement parce qu'ils sont situés dans des galaxies dont
l'axe est dirigé vers nous. En revanche, les radiogalaxies, correspondant
à des galaxies vues de profil, cachent leur noyau actif derrière la poussière
de leur anneau interne et des condensations de poussières plus éloignées,
concentrées sur leur plan équatorial. Seuls sont alors visibles les jets
qui s'extraient de part et d'autre de la galaxie, et le gaz qui se dilue
à leurs extrémités et forme les lobes radio caractéristiques. Entre
les quasars et les radiogalaxies, toute la population d'objets aux caractéristiques
intermédiaires (les types 1 et 2 des galaxies de Seyfert pourraient eux-même
correspondre à des orientations différentes d'objets exactement similaires
par ailleurs) peut se comprendre comme le résultat d'orientations intermédiaires
de leurs galaxies-hôtes, ainsi que par les effets de taux d'accrétion
variables selon les cas considérés.
Radiogalaxie
ou blazar? juste une question de point de vue...
Image
composite de Centaurus A. La galaxie et sa bande de poussières apparaît
en teintes chaudes au centre, les jets et les lobes radio en vert, et l'émission
X en bleu. (Sources et crédits : X-ray
(NASA/CXC/M. Karovska et al.); Radio 21-cm image (NRAO/VLA/Schiminovich,
et al.), Radio continuum image (NRAO/VLA/J.Condon et al.); Optical (Digitized
Sky Survey, U.K. Schmidt Image/ STScI).
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Évolution des
AGN.
Il existe un faisceau d'arguments qui
conduisent à considérer l'activité des noyaux des galaxies comme une
simple phase traversée à un certain moment de son existence par une galaxie
par ailleurs ordinaire. Tout n'est qu'affaire d'opportunité et de moyens.
Virtuellement toutes les galaxies pourraient bien, en effet, posséder
en leur sein un trou noir massif (ou un objet équivalent du point de vue
de ses effets gravitationnels). Notre propre Voie lactée,
par exemple, possède un tel Léviathan
( Le Centre galactique).
Simplement, il est endormi. Ce qui manque pour le réveiller, c'est de
la nourriture. Des étoiles et du gaz à gober, dans le cadre du mécanisme
envisagé par le modèle unifié. Or, de la nourriture, les galaxies
en renfermaient nécessairement beaucoup plus dans le passé. Elles étaient
également davantage sujettes qu'aujourd'hui aux collisions et aux
absorptions de galaxies plus petites, comme en attestent justement les
déformations qui affectent souvent les galaxies-hôtes des quasars. De
tels événements constituaient dès lors un apport supplémentaire de
nourriture pour le trou noir.
Et tout cela réuni peut expliquer qu'il
y ait eu une "ère des quasars" quand l'univers était beaucoup plus jeune.
Cette époque, qui n'est pas la plus ancienne qu'aient traversé les galaxies,
a commencé quand, à force de festins, le trou noir central est devenu
suffisamment massif pour servir de moteur à la machine décrite précédemment.
L'activité s'est ensuite apaisée, faute de carburant, et dans l'univers
actuel, les anciennes galaxies actives ne ardent plus du temps de leur
splendeur que leur trou noir central repus et assoupi...
Un schéma qui n'exclut pas la possibilité
d'un réveil à tout moment. Ainsi, des radiogalaxies proches telles que
M 87 (Virgo A) ou NGC 5128 (Centaurus A), ont continué à être nourries
à une époque récente. Une petite galaxies spirale gobée toute crue
semble même visible au sein de Centaurus A. De quoi expliquer leur activité
hors normes. Certains astronomes considèrent même que ces deux galaxies,
si elles étaient vue de face au lieu de l'être de profil, seraient bel
et bien des quasars (ou plus exactement des blazars). |
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